• Wastburg - Cédric Ferrand

    Wastburg - Cédric Ferrand

     

    Wastburg, une cité acculée entre deux royaumes, comme un bout de bidoche solidement coincé entre deux chicots douteux. Une gloire fanée qui attend un retour de printemps qui ne viendra jamais. Dans ses rues crapoteuses, les membres de la Garde battent le pavé. Simple gardoche en train de coincer la bulle, prévôt faisant la tournée des grands ducs à l’œil ou bien échevin embourbé dans les politicailleries, la loi leur colle aux doigts comme une confiture tenace. La Garde finit toujours par mettre le groin dans tous les coups foireux de la cité. Et justement, quelqu'un à Wastburg est en train de tricoter un joli tracassin taillé sur mesure. Et toute la ville attend en se demandant au nez de qui ça va péter.

    Je lis assez peu de fantasy parce que je suis très sélective et que je déteste le schéma « combat du bien contre le mal », « sauver le monde », etc., donc Wastburg m'a de suite fait envie.

    En plus de sortir des codes habituels de la fantasy, le roman sort aussi du schéma narratif classique : pas de héros, pas de personnage principal, mais une histoire par chapitre, même si des personnages reviennent à plusieurs reprises et qu'une trame générale apparaît peu à peu.

    Wastburg est une cité construite sur une île à l'embouchure d'un fleuve marquant la frontière entre le Waelmstat et la Loritanie, indépendante, et peuplée par des habitants renégats des deux pays. Autrefois dirigée par les majeers, tout à changé après la Déglingue, disparition de la magie, et l'organisation politique de la cité est désormais constituée d'un burgmaester, de maesters, avec sous leurs ordres des échevins et des prévôts chargés d'assurer la sécurité de Wastburg et de ses habitants par l'intermédiaire de la Garde (qui comprend la fluviale, la douane, la sécurité portuaire, etc.). Et ce sont eux que nous suivons, les divers membres de la Garde, leurs supérieurs, leurs auxiliaires, tout en profitant d'un aperçu privilégié de la vie quotidienne wastburgienne. Bien évidemment, il n'y a aucune grandeur dans tout ça, mais de la mesquinerie, de l'égoïsme, de l'opportunisme, de la fierté, de la camaraderie ; rien que de très commun, en fin de compte, et c'est ce que j'ai apprécié dans ce livre. La xénophobie des Walburgiens originaires du Waelmstat à l'encontre de ceux de Loritanie est également une donnée qui revient régulièrement, présenté du point de vue du Waelmstat, mais avec beaucoup d'humour et de dérision de la part de l'auteur, qui, en définitive, se moque tendrement de ses personnages.

    L'autre point que j'ai beaucoup aimé, c'est le style de Ferrand. Sa langue est riche, gouailleuse, pleine d'expressions imagées et d'argot. C'est une véritable plongée dans la rue wastburgienne et un moyen de lui donner corps, de la faire entrer dans la réalité. Pour moi qui adore les langues en général, je trouve ce parti pris délicieux et j'aimerais en faire autant, avoir la même imagination.

    Au final, l'histoire racontée compte peu, car le plaisir de lecture vient des tranches de vie présentées, de la richesse de l'expression, et d'une réflexion légère et amusante sur la vision qu'on peut avoir de soi-même, sur les autres et sur le passé, sur ce que l'on considère comme moderne ou comme archaïque ; une question intemporelle. Il ne faut donc pas chercher une grande histoire en entamant ce livre, mais un jeu d'ombres et de lumière sur une scène de théâtre.

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 14 Novembre 2014 à 20:03

    J'avais vraiment beaucoup aimé ce livre également, tout à fait différent de ce que l'on peut lire habituellement :)

    2
    Vendredi 14 Novembre 2014 à 20:40

    Et c'est justement ce qu'on peut lire habituellement qui m'a fait me détourner de la fantasy, et encore plus apprécier ce genre de petite pépite ^^

    3
    Samedi 15 Novembre 2014 à 09:46

    Bonjour!

    Une nouvelle fois, tu piques ma curiosité (et hop! dans ma PAL!). As-tu lu d'autres romans de cet auteur?

    En rapport avec ta remarque sur les langues, "La Pucelle de Diable-Vert" de Paul Beorn pourrait te plaire : il écrit en vieux français, ce qui est déroutant, mais nous plonge complètement dans le monde qu'il décrit. MAIS, ça reste du fantasy classique, avec le bien contre le mal.

    Je pense à toi, je suis dans les pages de "La fille du chaos". Tu n'as pas aimé? (pas de fiche lecture)

    Bon WE!

    Elise

    4
    Samedi 15 Novembre 2014 à 10:40

    De ce que je sais, qu'il n'a écrit qu'un autre texte, disponible uniquement en numérique, donc très peu pour moi ^^'

    Pour « La fille du chaos », je l'ai commencé mais arrêté en cours de route, pas parce qu'il ne me plaisait pas, au contraire, mais pour lire des auteurs des Utopiales. Je compte bien m'y replonger !

    5
    Mercredi 25 Mars 2015 à 20:32

    Tu m'intrigues !!

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    6
    Jeudi 26 Mars 2015 à 00:04

    Héhé :D

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